La manifestation prévue samedi à Paris a été interdite par la préfecture de police, qui invoque un risque de trouble à l’ordre public. La justice, saisie par les organisateurs, a confirmé l’interdiction.
Le tribunal administratif de Paris a confirmé l’interdiction de la manif pro-palestinienne qui devait avoir lieu samedi. «Je suis scandalisé, c’est une décision politique extrêmement grave de la part d’un gouvernement qui devra en payer le prix politique», a réagi Youssef Boussoumah du parti des Indigènes de la République.
Comme elle l’avait laissé entendre depuis plusieurs jours, la préfecture de police de Paris, faisant valoir «le contexte de tension accrue», a interdit la manifestation propalestienne prévue samedi dans la capitale, après les heurts survenus dimanche dernier devant deux synagogues parisiennes en marge d’une manifestation pro-Gaza.
Un autre défilé de soutien aux Palestiniens, prévu dimanche devant la gare de Garges-Sarcelles (Val-d’Oise), et un rassemblement pro-israélien organisé simultanément au même endroit par la Ligue de défense juive (LDJ), ont aussi été interdits.
François Hollande avait invoqué vendredi des «risques pour l’ordre public» pour justifier l’interdiction de la manifestation propalestinienne à Paris. «Il ne peut pas y avoir d’importation du conflit en France, il ne peut pas y avoir des manifestations qui se font face et des risques pour l’ordre public», avait expliqué le chef de l’Etat à des journalistes en marge d’un déplacement au Niger.
Six députés PS et EE-LV protestent
Six députés socialistes, ainsi que EE-LV, ont protesté contre l’interdiction de cette manifestation, appelant le gouvernernement à revenir sur cette décision. «Le seul camp que la France doit choisir, c’est celui de la paix. Aujourd’hui, nous refusons la décision trop hâtive du ministère de l’Intérieur et appelons le gouvernement français à lever rapidement cette interdiction de manifester», écrivent dans un communiqué les députés PS Alexis Bachelay, Yann Galut, Razzy Hammadi, Mathieu Hanotin, Pascal Cherki et Philippe Doucet. «Si aucun acte antisémite et raciste ne doit être toléré dans notre République, celle-ci doit se donner les moyens de les sanctionner fermement. Mais en aucun cas, elle ne doit remettre en cause une liberté fondamentale, au travers d’une mesure d’exception que nous considérons disproportionnée», déclarent-ils.
Sur ce point, ces députés demandent «que la lumière soit faite sur les incidents survenus le 13 juillet dernier en marge de la première manifestation», devant deux synagogues parisiennes. Pour eux, «celles et ceux qui prétendent ne pas vouloir importer le conflit, en soutenant une mesure d’exception, n’obtiendront en fait que l’effet contraire».
Pour sa part, dans un communiqué, Europe-Ecologie-les-Verts «s’insurge contre l’interdiction» et ajoute que si elle était confirmée la France serait «le premier pays à interdire ces manifestations».
«Alors qu’on peut manifester à Tel Aviv, à Berlin ou à New York pour dénoncer l’opération militaire israélienne en Palestine, les pouvoirs publics doivent permettre que ce rassemblement puisse avoir lieu dans le calme et le respect des opinions de chacun», conclut EE-LV.
Le NPA «indigné»
Le NPA (Nouveau parti anticapitaliste), «indigné» par cette interdiction, «exige» des autorités qu’elles «reviennent sur cette décision». «Si tel n’était pas le cas», prévient le parti, «nous appellerions tout de même, avec les forces politiques, syndicales et associatives attachées au respect des droits démocratiques et révoltées par les crimes commis à Gaza, à se rassembler pour protester publiquement».
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) a elle aussi déploré l’interdiction du rassemblement parisien, qui constitue selon elle «une entrave manifeste à une liberté constitutionnelle et un déni de la réalité». «Il ne sert à rien de tenter d’étouffer le sentiment de révolte que provoque l’intervention militaire israélienne contre la population de Gaza», a-t-elle estimé.
Que la manifestation parisienne soit autorisée ou non, ses organisateurs s’attendent à ce que «des centaines ou des milliers de personnes affluent vers Barbès» samedi.
D’autres manifestations devaient être organisées pendant le week-end, dès vendredi soir à Nice, Lille ou Libourne (Gironde), puis samedi à Lille (16 heures), Nantes (15 heures), Lyon (15 heures), Saint-Etienne (14h30), Marseille (15 heures), Montpellier (15 heures).
Vendredi matin le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, s’était prononcé pour l’interdiction de la manifestation à Paris, jugeant «intolérables» les «actes violents» du week-end dernier. «La République n’est pas compatible avec la haine (…) avec la xénophobie. L’antisémitisme ne peut pas parler une seconde fois parce qu’on sait ce à quoi il a abouti», a-t-il dit sur Europe 1.
Dimanche dernier, des incidents avaient éclaté devant deux synagogues, dont l’une située rue de la Roquette dans le XIe arrondissement parisien, à la fin d’une manifestation propalestinienne ayant rassemblé 7 000 personnes selon la police, 30 000 selon les organisateurs.
AFP