Ces crues ne sont rien par rapport à ce qui nous attend

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Les précipitations exceptionnelles qui ont provoqué la mort de 34 personnes le 22 novembre le seront de moins en moins, avertit un climatologue.

Les pluies abondantes qui ont ravagé le sud du pays vendredi 21 et samedi 22 novembre, faisant 34 morts, sont amenées à devenir de plus en plus fréquentes, selon le climatologue Mohamed-Saïd Karrouk,  professeur à l’université Hassan-II de Casablanca , qui assure même que « ces crues ne sont rien par rapport à ce qui nous attend ».

Les précipitations de ce week-end meurtrier, qui ont créé des torrents de boue, et fissuré ou carrément détruits des ponts et des routes, étaient 5 fois supérieures à la moyenne annuelle : ainsi, dans la région d’Ouarzazate, où il ne tombe qu’environ 35 à 50 millimètres de pluie par an, ce sont près de 170 millimètres qui sont tombés.

Transition climatique en cours

Pire, alors que les sols n’ont déjà pas réussi à éponger ces précipitations, la fin de semaine s’annonce presque aussi pluvieuse sur les régions Abda, Doukkala, Chiadma, Souss, Al Haouz, Tansift, et les régions du Haut-Atlas, puisque la Direction de la météorologie nationale (DMN) annonce pour le jeudi 27 novembre jusqu’à 120 millimètres de précipitations en seulement 24 heures.

Pourtant, parler de pluies exceptionnelles ne tient pas pour Mohamed-Saïd Karrouk, qui voit dans ce discours le vestige « d’une norme dépassée », alors que les changements climatiques modifient les standards météorologiques. « Le Maroc est dans une zone de transition climatique, on entre dans un nouveau climat », avance le météorologue. « Cette zone [la région d’Ouarzazate] ne recevait normalement que peu de précipitations, l’eau y provenait surtout de la fonte des neiges des montagnes », poursuit-il, assurant que « désormais, il commence à y pleuvoir ». Selon lui, la carte climatique traditionnelle du Maroc (voir ci-dessous) est en train de changer sous l’effet du réchauffement climatique :

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La question de savoir s’il va pleuvoir davantage ou moins au fil des années à venir ne fait pas l’unanimité chez les météorologues. Plusieurs études indiquent que le volume global des précipitations a tendance à reculer. Mais l’extrême versatilité de la pluviométrie complique le diagnostic.

« Le défi est énorme »

« Nous sommes dans une phase de transition, le climat ne s’est pas encore stabilisé », estime M-S Karrouk, pour qui la période des années 1980 et 1990 était une phase de sécheresse, alors que depuis 2005, s’ouvre une nouvelle phase, plus humide selon lui. Ce qui pourrait signifier pour les autorités la nécessité de revoir de fond en comble les normes de construction et d’urbanisme, dans des régions où jusque-là prévalaient des habitations en pisé, situées parfois trop près des oueds. « Le défi est énorme », avertit le climatologue.

Déjà, les récentes crues ont réveillé les frustrations de villageois et autorités locales dont la presse se fait largement l’écho, depuis les moyens alloués aux secours, l’état des infrastructures et la corruption. Le quotidien L’Economiste rappelle que le Plan national de protection contre les inondations, censé sécuriser une cinquantaine de sites prioritaires en 2012, n’a toujours abouti à la moindre évaluation. Abdelwahab Belfkih, président de la commune de Guelmim, l’un des secteurs les plus touchés, a affirmé au quotidien Libération avoir « adressé des centaines de lettres » à des départements ministériels « afin de procéder aux travaux d’entretien et de restauration des infrastructures routières, en vain ».

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