Maroc La (nouvelle) affaire Choubani en six actes

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Soupçonné de conflit d’intérêt après avoir tenté de louer 200 hectares de terres collectives de la région qu’il préside, Lahbib Choubani se retrouve plus isolé que jamais. Récapitulatif d’un scandale.

Acte I : L’éclatement

Le journal Al Akhbar, dans son édition du jeudi 11 août, consacre un article sur une sombre affaire de conflit d’intérêt, dont la vedette n’est autre que Lahbi Choubani, l’ancien ministre PJD plusieurs fois habitué à faire la une des journaux (Affaire Soumia Benkhaldouneexpulsion d’une journaliste du parlement à cause de sa robeaffaire des 4×4). Désormais président de la région Daraa-Tafilalet, Choubani est accusé par le journal, documents à l’appui, d’avoir demandé en compagnie d’autres membres locaux du PJD à louer 200 hectares de terres collectives (Soulalyates) situées dans la région dont il est lui-même président afin d’y produire des plantes fourragères. Datée du 28 mars 2016, la demande de location a été adressée au Na’ib (représentant) de la « Jemaâ Soulaliya », lui-même membre du PJD, assurent nos confrères de Medias24.com.

 

Acte II : Une demande jugée « illégale »

Aussitôt fuité dans la presse, le document administratif attestant de la demande de location émise par Choubani est largement commenté dans les réseaux sociaux. Plusieurs voient en la requête du président de région un conflit d’intérêt tandis que certains médias évoquent l’illégalité de la démarche, en relayant l’article 68 de la loi organique sur les Régions. L’article en question stipule qu’ « il est interdit à tout membre du conseil de la région d’entretenir des intérêts privés avec la région , les groupements de régions ou les groupements des collectivités territoriales dont la région est membre, […], ou d’exercer, de manière générale, toute activité pouvant conduire à un conflit d’intérêts, soit à titre personnel, soit comme actionnaires ou mandataire d’autrui, soit au bénéfice de son conjoint, ses ascendants ou descendants. »

 

Acte III : La réponse de Choubani

« Je ne me suis octroyé rien du tout ! Il y a plusieurs mois, j’ai demandé, avec d’autres personnes dont un chercheur-scientifique, une location d’un terrain de 200 hectares. Depuis, nous n’avons reçu aucune réponse et nous avons oublié l’affaire. Il n’y a jamais eu de cession et puis il ne s’agit pas d’un foncier de l’État mais des « terres Soulaliates« », s’est défendu Choubani sur le site leseco.ma. Pour lui, il s’agit d’une manœuvre électorale ourdie par ses adversaires politiques : «ce dossier a été évoqué en mars dernier puis vite oublié, pourquoi surgit-il alors maintenant ? Nous sommes en période électorale où les mensonges et l’intox florissent. Il faut donc être vigilant quant aux campagnes de mauvaise foi. Je signe et je persiste que le projet (production de places fourragères) allait servir la région dans une expérience pilote mais n’a pas abouti depuis 5 mois ».

 

Acte IV : Soumya à la rescousse

 

« Les initiateurs du projet présenté par Choubani souhaitaient rendre service aux populations, et ont essayé de louer les terres collectives (Soulalyates) au prix du marché et investir à bon escient les résultats de ce projet, et non pas à s’accaparer  un terrain de l’Etat à un prix dérisoire ». Cette défense provient de Soumya Benkhaldoune, ancien ministre PJD et toute récente épouse de Lahbib Choubani. Sur son compte Facebook, «  Mme Choubani » n’a pas hésité à faire allusion au scandale des « serviteurs de l’Etat » pour dédouaner son mari, ajoutant: « Choubani et ses associés n’ont pas usé de leur influence et n’ont pas exigé des habitants Soulalyines de leur louer leur terres par la force ».

 

Acte V : Sit-in et demande de révocation

Un collectif de la société civile locale a lancé un appel « pour la sauvegarde de la région Deraa Tafilalet », et organise un sit-in suivie d’une marche à Errachidia le soir du 14 août. « Le tissu associatif du sud-est suit avec une forte réprobation la mauvaise gestion financière et politique de la région Draâ Tafilalet de la part de son président Lahbib Choubani », peut-on lire sur l’appel publié par le collectif. Dans le même document, les auteurs réclament « la révocation » pure et simple du président de région.

 

Acte VI : Lâché par une partie du PJD

Alors que selon l’édition du 12 juin d’ Al Massae, la Commission intégrité et éthique du PJD serait sur le point de convoquer Choubani, prié de délivrer de plus amples explications sur cette affaire, plusieurs membres du PJD sont sortis de leur ornière en se désolidarisant publiquement de leur « frère » Pjdiste. Khalid Rahmouni, membre du Secrétariat général du PJD, a tiré à boulets rouge sur Choubani et ses associés dans le projet de location des terrains collectifs. « Nous n’avons ni le temps ni l’énergie pour défendre vos fantasmes », leur a-t-il asséné sur sa page Facebook. Un autre dirigeant du parti de la lampe, Abdeslam Bennaji, s’est adressé à Choubani en ces termes : « Que Dieu pardonne à mon frère Choubani dont je ne soupçonne pas instant la probité et la propreté de ses mains, mais, associer responsabilité et affaires, « émirat » et commerce, sont l’abécédaire qu’un homme intelligent et vertueux comme toi devrait maîtriser ».

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