Le terroriste tchadien arrêté ce vendredi à Tanger avait fait plusieurs repérages et s’apprêtait à passer à l’acte contre diverses cibles dans plusieurs villes du pays. Premières révélations.
Depuis son arrivée au Maroc le 4 mai, via un vol Ndjamena-Casablanca, l’«Egorgeur» a commencé la préparation de ses plans en effectuant des repérages dans plusieurs villes du royaume: Rabat, Tanger et Oujda. Les premiers éléments de l’enquête ont permis d’identifier les cibles qui étaient visées par ce Tchadien qui a passé nombre d’années en Egype. Il y a d’abord l’ambassade d’une grande puissance à Rabat, un établissement hôtelier et un casino à Tanger, ainsi qu’un centre culturel étranger, également dans la ville du Détroit.
L’«Egorgeur» a également planifié de cibler des personnalités civiles et militaires selon le mode opératoire de Daech: séquestrer, interroger puis décapiter en filmant le tout.
Pour exécuter ses plans, la phase de préparation était à un stade avancé comme en témoignent les composantes saisies par le BCIJ: les composantes pour fabriquer des bombes et quatre gilets explosifs. D’ailleurs, nos sources relèvent que le prévenu est un expert en explosifs. Cet artificier projetait de perpétrer ses attentats en commémoration du 13e anniversaire des attentats qui ont frappé Casablanca le 16 mai.
Selon les premiers éléments de l’enquête, les kamikazes se composeraient essentiellement d’Algériens. En plus des cibles, la prospection à Tanger par l’«Egorgeur» est probablement liée à la présence d’un potentiel jihadi dans cette ville. Mais à ce stade de l’enquête, aucune information n’est encore disponible sur les complicités locales du Tchadien.
Ce qu’il y a en revanche de sûr, c’est que Oujda est la localité de prédilection de Daech pour s’implanter au Maroc. L’organisation d’Al Bagdadi cherche à tout prix réaliser un coût d’éclat au royaume et proclamer à partir de l’Oriental l’implantation de Daech au Maroc. Cette région facilite l’implication de la composante algérienne (déjà active) dans les opérations visant le Maroc.
Daech change d’orientation
Pourquoi Daech choisit un étranger, de surcroît tchadien (pays peu connu pour ses connexions avec l’Etat islamique), pour perpétrer des attentats au Maroc ?
L’organisation terroriste a échoué à s’implanter au Maroc via des recrues locales (cellules comme loups solitaires). En témoigne le grand nombre d’opérations coup de poing menées par le BCIJ depuis sa mise en place et, avant, par la DGST.
Ayant échoué à s’implanter localement au Maroc, Daech a modifié sa stratégie : envoyer des militants locaux dans les zones de conflit (Syrie et Irak) et les réintroduire au royaume. Cette démarche n’a pas non plus donné de résultats, et fort heureusement.
Depuis quelque temps, Daech essaie de jouer la carte de sa filiale libyenne pour déstabiliser le Maroc. Mais, là encore, c’est un échec total. En témoignent les arrestations de deux individus, des Marocains, ces derniers jours, l’un rentré au pays via l’Algérie et interpellé à Saidia, l’autre arrivé à l’aéroport de Casablanca depuis la Tunisie.
Evidemment, Daech sait depuis longtemps que ses recrues arabes n’avaient aucune chance de passer inaperçues ou d’échapper aux radars des services de sécurité marocains. L’organisation d’Al Bagdadi a choisi un profil de nature à passer à travers tous les filets de la surveillance du territoire.
Un Tchadien «de faible constitution», capable de se fondre parmi les candidats à l’émigration clandestine. Si la compétence et la vigilance des hommes de Hammouchi a permis de neutraliser à temps l’artificier tchadien, il ne fait pas de doute que la nouvelle stratégie de Daech n’augure rien de bon. C’est aux candidats les moins susceptibles d’attirer l’attention que Daech va confier la mission de réussir un coup funeste au royaume. Cette nouvelle orientation nécessite davantage de vigilance et probablement un peu de chance, aussi, pour continuer de déjouer les plans d’Al Bagdadi.