Le modéré Hassan Rohani a remporté l’élection présidentielle iranienne, mettant un terme à huit années de pouvoir exécutif conservateur, a annoncé samedi le ministre iranien de l’Intérieur.
M. Rohani, soutenu par les camps modéré et réformateur, a obtenu 18,6 millions de voix (50,68%) au premier tour du scrutin disputé vendredi face à cinq candidats conservateurs, a précisé Mostapha Mohammad Najjar le ministre, citant des résultats définitifs.
Il devance très largement le maire conservateur de Téhéran Mohammad Bagher Ghalibaf (6,07 millions de voix) et le chef des négociateurs nucléaires Saïd Jalili (3,17 millions), qui était soutenu par l’aile dure du régime.
Le taux de participation est de 72,7%, a ajouté M. Najjar. En 2009, ce taux était de 85%.
La victoire du M. Rohani ne marquera toutefois pas une rupture dans la politique de la République islamique, les dossiers stratégiques comme le nucléaire ou les relations internationales étant sous l’autorité directe du guide suprême Ali Khamenei.
Cette élection intervient sur fond de grave crise économique due aux sanctions internationales imposées à l’Iran en raison de son programme nucléaire controversé et quatre ans après la victoire contestée dans la rue du conservateur Mahmoud Ahmadinejad.
Forte participation
Aucune irrégularité n’a été constatée, a précisé le Conseil des gardiens de la Constitution, mais le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’Homme en Iran, Ahmed Shaheed, a estimé avant le scrutin que le climat politique dans le pays ne permettait pas de qualifier de « libre et équitable » la présidentielle.
Proche de l’ex-président modéré Akbar Hachémi-Rafsandjani, M. Rohani a bénéficié du désistement du candidat réformateur Mohammad Reza Aref et de l’appui du chef des réformateurs Mohammad Khatami.
Tout en étant le représentant de l’ayatollah Khamenei au Conseil suprême de la sécurité nationale, il prône plus de souplesse dans le dialogue avec l’Occident, un dialogue qu’il avait dirigé entre 2003 et 2005 sous la présidence Khatami. Durant la campagne, il a évoqué de possibles discussions directes avec les Etats-Unis, ennemi historique de l’Iran.
Déploiement policier
Alors que les candidats avaient demandé à leurs partisans d’éviter tout rassemblement avant l’annonce des résultats complets officiels, la vie à Téhéran poursuivait son cours normal même si les forces de l’ordre ont été déployées sur les grandes places.
En 2009, l’annonce de la réélection de M. Ahmadinejad dès le 1er tour avait provoqué des heurts entre police et partisans des candidats réformateurs malheureux, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, et des semaines de manifestations de masse dénonçant des fraudes massives.
La contestation avait été sévèrement réprimée et les deux ex-candidats sont en résidence surveillée depuis 2011.
Pour les réformateurs, l’enjeu du scrutin était de mobiliser ceux qui avaient manifesté contre la réélection de M. Ahmadinejad puis juré de ne plus participer à un scrutin qu’ils estimaient joué d’avance. Pour les conservateurs, il s’agissait de montrer que le peuple soutenait le régime face aux « ennemis ».
Mais la majorité des électeurs partageait la même préoccupation: la crise économique provoquée par les sanctions internationales et qui se traduit par une hausse du chômage, une inflation supérieure à 30% et une dépréciation du rial de près de 70%.
Ces sanctions ont été imposées pour contraindre l’Iran, accusé malgré ses démentis de vouloir se doter de l’arme atomique, de cesser ses activités sensibles.
Selon la Constitution, le président est le deuxième personnage de l’Etat et ses capacités d’action sont limitées sur les dossiers stratégiques, tel le nucléaire.
De plus, M. Rohani, devra composer avec les frères Ali et Sadegh Larijani, deux conservateurs à la tête respectivement du Parlement et de l’Autorité judiciaire.
Israël, l’autre ennemi juré de l’Iran, et les Etats-Unis ont d’ailleurs souligné que l’élection n’apporterait pas de changement dans la politique iranienne.
AFP